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Salvinia molesta D.S.Mitch., 1972 [syn. Salvinia adnata Desv., 1827]


Nom(s) vernaculaire(s)Salvinie géante
FamilleSalviniaceae
OrigineAmérique du Sud
Date d’introductionNon connue

Statuts

Régions administratives
PACAOccitanieCorse
PréventionEmergenteEmergente

Zones biogéographiques continentales
Sud-OuestPyrénéesMéd. Occ.Méd. PACAMassif CentralAlpine
PréventionPréventionAlertePréventionPréventionPrévention


Description

  • Port : fougère flottante d'eau douce non enracinée.
  • Feuilles : feuilles flottantes potentiellement supérieures à 18 mm de long, à pli médian net, distiques, à papilles multicellulaires portant chacune 2-4 expansions apicales filiformes ("poils étoilés") ; poils étoilés des feuilles à portion basale conique longue et à branches normalement soudées à l'apex.

  • Tige : tiges horizontales ramifiées qui flottent juste sous la surface de l'eau.

  • Sporocarpes : sporocarpes groupés par 5-30 en grappe ou en panicule plus ou moins allongée. Les spores formées sont avortées à cause d'une anomalie de la méiose. Sporulation de juin à septembre.

  • Taille : de 5 à 15 cm.

  • Confusions possibles : Salvinia molesta fait partie des 4 espèces du complexe de Salvinia auriculata, difficiles à différencier les unes des autres, mais elle est la seule des 4 à être présente en France. En France, elle peut être confondue avec Salvinia natans, qui se distingue par ses feuilles plus courtes et la morphologie de ses poils étoilés, ou avec Azolla filiculoides, qui se distingue par ses feuilles encore plus courtes, imbriquées comme des tuiles, sans poils étoilés. Ces deux espèces sont également exotiques.



Cartes

Répartition par mailles INPN de 5*5 km
Fréquence par départements

Altitudes
Biologie et écologie
MilieuxEaux courantes ou stagnantes ; Milieux agricoles
Type de reproduction / propagation

La salvinie géante est un clone hybride stérile, dont un des parents pourrait être Salvinia auriculata. Elle se reproduit uniquement de manière végétative par croissance et fragmentation. Les nœuds des tiges peuvent produire des bourgeons puis se séparer du reste de la tige et former ainsi de nouveaux clones. La plante est transportée par l'eau (et les inondations), le vent, les animaux et les activités humaines (bateaux, véhicules, filets, rejets d'aquariums, etc.).

Type(s) biologiqueHydrophyte nageant

Phénologie
Floraison (mois)JFMAMJJASOND


Impacts et aspects positifs
Impacts écologiques

D'après la bibliographie : La salvinie géante a une croissance très rapide, allant jusqu'à 22% d'augmentation du nombre de feuilles par jour et jusqu'à 17% d'augmentation du poids sec par jour. Elle peut rapidement recouvrir des lacs, des étangs ou des cours d'eau à courant lent. Les matelas ainsi formés à la surface de l'eau peuvent atteindre 1 m d'épaisseur. Ils empêchent la lumière de passer et éliminent ainsi les espèces végétales indigènes, algues et phytoplancton. De plus, ces matelas diminuent le pH et la concentration en dioxygène, et augmentent les concentrations en dioxyde de carbone et en sulfure d'hydrogène dans l'eau. Ces changements sont nocifs pour la faune benthique.


Impacts sanitaires

D'après la bibliographie : La salvinie géante fournit un milieu de vie propice à certaines espèces de moustiques qui peuvent être vecteurs de virus pour l'homme (ex. malaria, encéphalite, dengue, filariose). De plus, les matelas denses formés à la surface de l'eau ressemblent fortement à un sol stable et peuvent causer des accidents.


Impacts sur les activités humaines

D'après la bibliographie : La salvinie géante peut coloniser des rizières et réduire leur production. Les matelas formés par la plante peuvent réduire l'accès des bateaux et des personnes (pêche, loisirs), polluer des eaux potables, causer des inondations, bloquer des canaux d'irrigation ou des usines hydroélectriques. Des villages de Papouasie-Nouvelle-Guinée entièrement dépendants des transports fluviaux ont été désertés en partie à cause de l'invasion biologique par la salvinie géante.


Aspects positifs

D'après la bibliographie : La salvinie géante est consommée par la faune aquatique (poissons, oiseaux). Elle peut être utilisée comme engrais ou comme alimentation pour les animaux d'élevage (poissons, bétail, volailles, porcs, etc.). Elle peut concentrer les nutriments et les métaux lourds présents dans l'eau, et elle est donc utilisée en phytoremédiation. Elle peut également servir pour la production d'agrocarburants ou de papier. Enfin, elle pourrait avoir des propriétés médicinales.



Gestion

Carte des actions réalisées

Méthodes de contrôle ou d’éradication
Prévention

Éviter d'acheter cette espèce pour l'ornement des étangs, bassins et des aquariums. La salvinie géante est désormais inscrite sur le Règlement européen n°1143/2014 relatif à la prévention et à la gestion de l'introduction et de la propagation des espèces exotiques envahissantes, repris par arrêtés ministériels du 14 février 2018 puis du 10 mars 2020 portant mise à jour de la liste des espèces animales et végétales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain. Il est ainsi interdit d'introduire cette espèce dans le milieu naturel, de l'utiliser, de la transporter, de la détenir, de l'échanger ou de la commercialiser.

Pour rappel, il n'est évidemment pas recommandé de rejeter de plantes aquatiques (ex. contenus d'aquariums, de mares ou de nourriture pour les poissons d'aquaculture ou d'aquariophilie) dans la nature.

La prévention de son installation reste la méthode de gestion la moins chère et la plus efficace. La salvinie géante aime les milieux eutrophes et riches en nutriments, donc limiter l'eutrophisation (ex. eaux usées agricoles) des plans et cours d'eau limite le risque d'envahissement.

Méthodes de contrôle ou d’éradication manuelles

L'enlèvement manuel des matelas est possible pour contrôler les populations de salvinie géante dans les petites zones envahies mais il est laborieux. Les opérations doivent être renouvelées tous les mois car chaque clone peut se multiplier. Il n'est pas efficace dans les très grandes zones envahies car la vitesse de multiplication de la salvinie géante dépasserait celle de l'enlèvement manuel.

Méthodes de contrôle ou d’éradication mécaniques

L'enlèvement mécanique des matelas de salvinie géante est possible avec des machines spécifiques. Les opérations doivent être renouvelées tous les mois car chaque clone peut se multiplierà nouveau.

Des filets ou des estacades flottantes peuvent être utilisés pour retenir les matelas de salvinie géante, mais ils risquent de se casser en cas de crue.

Méthodes de contrôle ou d’éradication chimiques

L'utilisation de produits phytosanitaires est interdite en France dans les zones humides ou aquatiques. Pour rappel, l’utilisation d’herbicides est interdite à moins de 5 m d’un cours d’eau ou d’une zone de captage et inappropriée en sites naturels. Les méthodes de lutte chimique ont des impacts négatifs sur l’environnement et la santé humaine : il est indispensable de privilégier des méthodes alternatives. De plus, il est nécessaire de se tenir au courant de la législation en vigueur en matière d'utilisation de produits phytosanitaires : http://e-phy.agriculture.gouv.fr/

De plus, les poils étoilés situés sur les feuilles de la salvinie géante empêchent la pénétration de certains herbicides dans la plante.

Méthodes de contrôle ou d’éradication biologiques ou écologiques

Le coléoptère Cyrtobagous salviniae a été relâché dans 22 pays comme agent de lutte biologique pour lutter contre la salvinie géante. Il a été relâché pour la première fois en Australie en 1980. Il est très efficace contre cette espèce dans les zones tropicales et sub-tropicales, où il réduit significativement la taille des zones envahies. Par contre, il est peu efficace dans les zones tempérées, ainsi qu'à l'ombre.

Un autre coléoptère, Cyrtobagous singularis, a été introduit dans plusieurs pays pour lutter contre la "salvinie géante", s'agissant d'une autre espèce proche, Salvinia auriculata. Il n'a pas été efficace contre S. molesta dont il s'agissait en réalité.

La sauterelle aquatique Paulinia acuminata a été relâchée dans 7 pays pour lutter contre la laitue d'eau (Pistia stratiotes), l'azolla fausse-fougère (Azolla filiculoides) et la salvinie géante. Concernant la salvinie géante, elle a été efficace dans un site au Zimbabwe, mais pas ailleurs.

Le papillon de nuit Samea multiplicalis a été introduit dans 5 pays pour lutter contre la jacinthe d'eau (Pontederia crassipes), la petite salvinie (Salvinia minima) et la salvinie géante. Il a été efficace contre la petite salvinie aux États-Unis, mais pas contre la salvinie géante.

Cyrtobagous salviniae est donc considéré comme le seul de ces 4 agents biologiques à être véritablement efficace pour lutter contre la salvinie géante. Attention! La lutte biologique avec ces agents biologiques ne peut être envisagée en France, du fait des risques induits par leur introduction qui n'ont pas encore été étudiés par les organismes de recherche habilités. L'impact de l'introduction de ces nouvelles espèces exotiques sur le territoire métropolitain (notamment vis à vis de la biodiversité locale) n'est à ce jour pas caractérisé.

Autres méthodes de contrôle ou d’éradication

L'eau salée peut être utilisée pour éliminer la salvinie géante mais elle a un impact sur les autres espèces végétales, la faune et le milieu en général : son utilisation est donc à proscrire en milieux naturels ou semi-naturels (de plus, il y a une réglementation spécifique à l'ajout de produits de base dans l'environnement comme l'utilisation du sel comme herbicide). La salvinie géante résiste à des concentrations en sel correspondant à 20% de celle de l'eau de mer.

Plus d'informations : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32017R1529

L'assèchement des plans d'eau envahis, pour lesquels cela est possible, peut être réalisé pour éliminer la salvinie géante, mais celui-ci doit être suffisamment long car elle peut survivre de longs mois dans un milieu asséché. Cette méthode reste peu efficace.

Gestion des déchets

De grands volumes de matière végétale en décomposition laissés sur les berges des rivières et plans d'eau sont inacceptables (risque de dissémination). Les produits d'arrachage doivent être évacués directement vers un site de valorisation (unité de compostage ou méthanisation) ou stockés temporairement en dehors de toute zone humide ou susceptible d'être inondée (sous réserve dans ce cas de l'obtention d'une dérogation au transport de l'espèce) en vue d'être ensuite valorisés.

Le brûlage des déchets secs sur place est possible mais nécessite une dérogation et doit être utilisé en dernier recours.

Précautions

Les engins et outils doivent faire l'objet d'un nettoyage, avant de traiter la zone pour ne pas importer de nouvelles graines d'espèces exotiques, et après les travaux pour ne pas les introduire vers d'autres lieux lors de futurs travaux.

Commentaires

Espèce végétale exotique envahissante sur le territoire métropolitain :

- Règlement d'exécution 2019/1262 de la Commission du 25 juillet 2019 modifiant le règlement d'exécution (UE) 2016/1141 pour mettre à jour la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l'Union.
- Arrêté du 10 mars 2020 portant mise à jour de la liste des espèces animales et végétales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain.
- Arrêté du 14 février 2018 relatif à la prévention de l'introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain. Annexe I-3.

L'éradication complète de la salvinie géante est pratiquement impossible, sauf pour de très petites zones envahies.

La salvinie géante est réglementée en Afrique du Sud, en Australie, aux États-Unis, en Europe, en Nouvelle-Zélande et en Thaïlande. En Australie, la lutte est obligatoire.

Un envahissement par la salvinie géante peut atteindre une biomasse de 400 tonnes/ha en poids mouillé.


Sources bibliographiques

CRC Weed Management, 2003. Weed Management Guide. Salvinia molesta. Cooperative Research Center for Australian Weed Management. 6 p.

EPPO, 2017. Data sheets on pests recommended for regulation : Salvinia molesta D.S. Mitch. EPPO Bulletin, 47: 531-536.

GISD, 2015. Species profile Salvinia molesta [en ligne]. Global Invasive Species Database. Disponible sur : http://iucngisd.org/gisd/species.php?sc=569 (page consultée le 09/03/20)

Lal A., 2016. Salvinia molesta: An assessment of the effects and methods of eradication. The University of San Francisco. 78 p.

Martin G.D., Coetzee J.A., Weyl P.S.R., Parkinson M.C., Hill M.P., 2018. Biological control of Salvinia molesta in South Africa revisited. Biological control, 125: 74-80.

Maseko Z., Coetzee J.A., Hill M.P., 2019. Effect of shade and eutrophication on the biological control of Salvinia molesta (Salviniaceae) by the weevil Cyrtobagous salviniae (Coleoptera: Erirhinidae). Austral Entomology, 58: 595-601.

Mikulyuk A., Parys K., 2019. Salvinia molesta (kariba weed) [en ligne]. Centre for Agriculture and Biosciences. Disponible sur : https://www.cabi.org/isc/datasheet/48447 (page consultée le 09/03/2020)

Mukherjee A., Knutson A., Heinz K., 2017. Biological control of Salvinia molesta : Population dynamics of Cyrtobagous salviniae in Lake BA Steinhagen. J. Aquat. Plant. Manage., 55: 46-49.

Schooler S.S., Salau B., Julien M.H., Ives A.R., 2011. Alternative stable states explain unpredictable biological control of Salvinia molesta in Kakadu. Nature, 470: 86-89.

Val'hor, 2020. Salvinia molesta [en ligne]. Code de conduite plantes envahissantes. Disponible sur : https://www.codeplantesenvahissantes.fr/plantes-concernees/ (page consultée le 28/04/2020)

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Citation recommandée : CBNMed, 2021. Salvinia molesta [en ligne]. INVMED-Flore, plateforme sur les invasions biologiques végétales. Conservatoire botanique national méditerranéen et Conservatoire botanique national de Corse. Disponible sur : http://www.invmed.fr

Auteurs CBNMed : KD, MH, CC, CS
Révision : 2021

 



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